Retraites : la vérité des chiffres

, par Sandrine GAMBLIN

article dans le n°29 de juillet 2010

Dans un article intitulé « Financement des retraites : l’enjeu des cotisations patronales », Bernard FRIOT, professeur de sociologie à l’université Paris X, écrit : « on oublie toujours, quand on raisonne sur l’avenir des retraites, que le PIB progresse d’environ 1,6% par an en volume, et donc qu’il double, à monnaie constante, en 40 ans. C’est pourquoi nous avons pu multiplier par 4,5 les dépenses de pension depuis 1960 ».

Illustration :
 actuellement, nous avons 10 actifs pour 4 retraités. Ils produisent 100. Cela fait donc 7 par personne (100 : 14)
 dans quarante ans, nous aurons 10 actifs pour 8 retraités. Mais ils produiront 200, soit 11 par personne (200 : 18).

C’est limpide : il sera possible de financer les retraites au même niveau qu’avant leurs « réformes » à remonter le temps. Et ce en conservant une part de richesses conséquente pour l’élévation du niveau de vie et les investissements.

Pourquoi une donnée aussi importante est-elle absente du débat ?

Pourquoi cet acharnement à détruire un système (répartition, salaire direct + salaire différé) qui fonctionne si bien ? Parce que ce système social français, mis en œuvre sur la base des propositions du Conseil National de la Résistance à partir de 1945, symbolise la lutte des travailleurs pour leurs droits contre le droit de propriété des moyens de production.

Autrement dit, ce système est une victoire de la classe ouvrière contre l’arbitraire financier. Il fait échapper 40% du salaire (les cotisations sociales) à la spéculation financière. Les cotisations donnent des droits aux salariés, et par voir de conséquence de la dignité et des responsabilités : pas besoin de mendier une retraite, une allocation chômage, des indemnités en cas de maladie. « Quand on a un droit, on ne demande rien à personne, on le fait respecter » aimait à répéter à juste titre Marc Blondel.

A partir de là, la stratégie des financiers et de leurs alliés est simple : réduire nos droits pour nous contraindre à acheter leurs produits, à financer individuellement nos assurances sociales. Et donc à être seuls face au pouvoir financier.

La bataille pour nos retraites est double :
  Elle conditionne le niveau de vie que nous voulons pour nos anciens (ceux que nous serons dans quelques temps).La retraite doit-elle redevenir un naufrage économique comme par le passé ? C’est un choix de société.

  Elle symbolise la lutte pour la répartition entre travail et capital des richesses produites : contre le minimum vital que la finance veut imposer, nous réclamons une juste répartition, les fruits du travail et des efforts.

Aucune négociation de la réforme des retraites n’est possible dès lors où elle resterait basée sur une diminution du salaire (direct + différé) au profit du capital. Il ne s’agit pas simplement de « réécrire » la réforme comme le voudrait Thibault pour la CGT, ni de l’amender sur quelques points comme le voudrait Chérèque pour la CFDT !

Non, pour FO c’est clair : il faut financer nos retraites, l’argent existe, si besoin par une réforme fiscale. Le statu quo est la moins pire des solutions, qui maintient le système debout, cohérent, et qui ne remet pas en cause la répartition actuelle des richesses (même si elle n’est pas satisfaisante).

Et par conséquent un seul mot d’ordre : retrait pur et simple du projet Sarko-Fillon-Woerth, et grève interprofessionnelle public-privé pour l’obtenir. C’est cette position que l’UD FO de la Manche défend et propose à tous les salariés.